Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) : Qui est concerné, et à quelle échéance ?
L’année 2023 est marquée par une évolution importante du reporting environnemental en Europe avec l’avènement de la “Corporate Sustainability Reporting Directive” (CSRD), en français, directive sur le reporting de durabilité des sociétés.
La CSRD entre dans le cadre du Pacte Vert européen, qui vise la neutralité carbone du continent en 2050. Elle oblige à publier des informations détaillées sur les impacts liés aux questions sociales, environnementales et de gouvernance.
La CSRD vient remplacer l’ancienne norme de reporting climat européenne, la “non-financial reporting directive” (NFRD), qui avait notamment été déclinée en France pour donner la DPEF (directive de performance extra financière).
Cette nouvelle directive, adoptée en fin d’année 2022 par la Commission européenne, étend substantiellement le nombre d’entreprises visées ainsi que les informations qu’elles devront communiquer sur différents indicateurs environnementaux et sociaux, dont le climat.
Cet article du pôle d’expertise Réglementations de Carbone 4 paraît après la publication de l’acte délégué de la CSRD par la Commission Européenne[1]. Cet acte délégué, précisant les informations à reporter, réduit substantiellement la portée de cette loi par rapport aux propositions de normes ambitieuses qu’avaient publiées l’EFRAG[2] en novembre 2022[3]. Le contenu de cette loi et les modifications apportées par l’acte délégué sont décryptés dans un second article.
[Cet article arrive après un amendement de la Commission Européenne, modifiant les seuils et calendriers de certaines entreprises (les grandes entreprises pas encore soumises à la NFRD et les PME cotées). Adopté par la Commission le 17 octobre 2023 mais pas encore définitif, cet amendement est pris en compte dans cet article.]
Dans ce premier article, nous nous concentrons sur le qui et le quand : quelles entreprises seront soumises à la CSRD en Europe et d’ici quand ? Nous faisons un zoom sur les entreprises françaises.
1. Qui est concerné par la CSRD ? Quels changements auront lieu ?
La mise en place de la CSRD et ses transpositions en lois nationales vont bousculer le paysage réglementaire européen en termes de reporting climat. Avant cette nouvelle réglementation, 11 700 entreprises européennes étaient soumises à des obligations de publication de reporting extra-financier. Ce chiffre passera à environ 50 000 une fois l’entrée en vigueur de la CSRD (variable en fonction des seuils adoptés)[4]. Ainsi, quelles sont ces nouvelles entreprises ou personnes morales soumises à la réglementation ? Comment ces nouvelles obligations s’inscrivent-elles dans le contexte réglementaire des pays de l’Union[5] ? Comment anticiper ces changements ? Nous étudierons ces questions au prisme de la réglementation en France. Forte de sa position de deuxième économie de l’Union, la France présente également des particularités propres en termes d'obligations extra-financières, que nous allons décrypter dans cet article.
L’application de la CSRD débutera dès l’exercice 2024 et s'étendra au cours du temps. Le Conseil de l’Union Européenne, le Parlement Européen et la Commission Européenne[6] ont établi le calendrier suivant :
- déclarations en 2025 sur l'exercice 2024 pour les entreprises déjà soumises à la directive sur la publication d'informations non financières;
- déclarations en 2026 sur l'exercice 2025 pour les autres grandes entreprises ;
- déclarations en 2027 sur l'exercice 2026 pour les PME cotées, avec option de décalage de 2 ans ;
- déclarations en 2029 sur l'exercice 2028 pour les entreprises étrangères avec une filiale Européenne
Le schéma ci-dessous permet de savoir si une entreprise (ou personne morale) est concernée par la CSRD et à partir de quand.
2. La France : précurseuse pour la publication de données extra financière (ou de données climat) des entreprises
En France, la culture de la transparence des données extra financières est assez ancienne, puisque dès 2010, la loi Grenelle II, via son article 75, a introduit un outil de mesure et de suivi des émissions de gaz à effet de serre des organisations et des collectivités territoriales, le Bilan des Émissions de Gaz à Effet de Serre (BEGES). Il est alors obligatoire pour les entreprises de plus de 500 employés en France métropolitaine de reporter leurs émissions directes (scope 1 et 2) et pour certaines entreprises, depuis 2022, les émissions indirectes significatives[7]. La France est ainsi le seul pays du monde à imposer un reporting des émissions directes et indirectes (Scopes 1, 2 & 3[8]). La France fait donc partie des pays les plus en avance en termes de réglementation sur le reporting climat[9]. Par ailleurs, de nombreuses entreprises françaises mais aussi internationales n’ont pas attendu la réglementation pour reporter leurs stratégie Climat.
En 2017, la France transpose la NFRD européenne en loi nationale via la DPEF (Déclaration de Performance Extra Financière). La transposition intègre l’obligation de reporting des émissions de gaz à effet de serre sur le scope 3, qui n’était pas exigée par la NRFD : la France allait donc plus loin dans sa transposition que la directive européenne initiale. Aujourd’hui, la CSRD qui vient remplacer la NFRD aura pour conséquence d’étoffer et de structurer encore davantage le reporting climat et d’augmenter significativement le nombre d’entreprises concernées.
Le schéma ci-dessous décrit les différences et complémentarités d’application entre le BEGES (norme en vigueur en France, en vert) et la CSRD au cours des années à venir (dates en bleu). Si aujourd’hui environ 5 000 acteurs privés et publics sont soumis à la publication d’un BEGES réglementaire[10], il est estimé qu’au total environ 8 000 entreprises seront soumises à un reporting suite à l’introduction de la CSRD et sa transposition en loi française (variable en fonction des seuils adoptés)[11].
En conclusion, la nouvelle norme reporting climat européenne, CSRD ou “Corporate Sustainability Reporting Directive”, apporte non seulement des changements importants sur les informations à divulguer, mais étend aussi le nombre d’entreprises tenues de partager (et donc collecter) leurs données climatiques.
Selon les seuils adoptés, environ 50 000 entreprises en Europe devront divulguer des informations climat, contre environ 12 000 actuellement.
Notre second article se concentre sur le contenu des standards - analysant la nature des évolutions de fond présentes dans la CSRD, et particulièrement sur le volet climat. En effet, les entreprises européennes seront tenues de mieux comprendre et réduire leur impact sur le climat, mais aussi l’impact que le changement climatique aura sur leurs opérations.
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