L’empreinte carbone des grands évènements sportifs internationaux, un essai non transformé… par la venue des spectateurs !
Les grands évènements, sportifs ou non, rassemblent des fans du monde entier prêts à faire de grands déplacements, le plus souvent en avion, pour vivre ensemble des moments forts en émotions. Mais étant donné les distances parcourues et la quantité de personnes que ces évènements rassemblent, l’impact climatique est considérable. Peut-on imaginer des évènements d’une telle envergure dans un monde bas carbone ?
L’impact climatique des grands évènements sportifs est très élevé
Les fédérations internationales sportives et les états concernés ont montré récemment leur inconséquence en termes d’impact climatique, avec la dernière Coupe du monde de football au Qatar dans des stades climatisés, et la sélection de l’Arabie Saoudite pour les jeux asiatiques 2029 d’hiver avec production de neige artificielle dans des conditions désertiques. À titre d’exemple, l’empreinte carbone de la Coupe du monde du Qatar ramené à une minute de jeu est proche de 1000 tonnes de CO2, au-delà de l’émission moyenne d’un.e Français.e sur toute sa vie [1] . Et même un évènement sportif organisé dans des conditions plus classiques, comme la Coupe du Monde de Rugby 2023 a une empreinte carbone estimée à 640 000 tCO2e [2] , soit les émissions annuelles de 64 000 Français.es.
Les déplacements, principale source d’impact des évènements sportifs
L’impact climatique d’un évènement sportif organisé dans des conditions normales est dû en moyenne à 80% aux déplacements des spectateurs. C’est le cas de la coupe du monde de rugby, où les émissions associées aux déplacements sont estimées aux trois quarts de l’impact climatique, devant le numérique, l’hébergement et la restauration [3]. La venue des spectateurs étrangers dans le pays hôte représentent 75% des émissions du transport, devant les déplacements en France durant la compétition, et loin devant les émissions liées aux déplacements des équipes et du staff (1% des émissions du transport), qui font pourtant l’objet d’une couverture médiatique très intense. On peut d’ailleurs souligner l’effort pour réaliser 70% des déplacements des équipes en train, avec un impact certes modéré, mais une valeur symbolique forte [4].
La venue des fans internationaux
La venue des fans internationaux est l’éléphant dans la pièce, pour deux raisons :
- Les grandes distances parcourues : par exemple, un spectateur néo-zélandais qui se rend à Paris pour la coupe du monde de rugby émet 6 t CO2e [5] sur l’aller-retour, ce qui représente plus de la moitié des émissions annuelles moyennes d’un Français [6]
- Le nombre considérable de personnes effectuant un déplacement. En France, on n’attendait par exemple pas moins de 600 000 voyageurs étrangers pour la Coupe du monde de rugby [7] , avec des bénéfices économiques attendus par le secteur du tourisme.
Comment réconcilier les évènements sportifs internationaux avec l’écologie ?
Pour réduire ses trajets en avion, il est possible d’acheter dès aujourd’hui des carburants alternatifs permettant de réduire en partie l’impact climatique, mais cette ressource est [8] et restera limitée [9] . De manière plus générale, la décarbonation passera nécessairement par une restriction du trafic aérien (voir notre FAQ aviation), et donc pour notre sujet, par une limitation du nombre de spectateurs internationaux.
Il est vrai que les alternatives ne sont pas évidentes, au vu de la frustration potentielle des fans internationaux par rapport aux émotions sur place. Rappelons néanmoins que les grands évènements sportifs ont précédé l’ère du transport aérien de masse, et la révolution pour accompagner en direct les exploits sportifs est venue par les médias comme la radio et télévision, dont l’empreinte carbone par spectateur reste très modérée. La majeure partie de l’humanité suivant encore aujourd’hui ces évènements à la télévision, la restriction sur la venue des personnes ne concerne qu’une minorité de spectateurs.
La mise en œuvre d’alternatives viables pose un certain nombre de questions, dont les réponses permettraient d’envisager des solutions :
- En préambule, toutes les mesures limitant le trafic aérien de manière générale (mise en place de quotas, taxe carbone, coûts des carburants alternatifs, etc.) s’appliqueraient naturellement au cas des déplacements pour les évènements. Cela pourrait d’ailleurs inciter les personnes à combiner davantage les voyages, saisissant l’occasion d’un match pour faire un voyage touristique lointain, à la place d’en faire deux.
- Un système de tirage au sort pour les spectateurs étrangers au pays ou au continent d’accueil, déjà mis en place en place pour les Jeux Olympiques, permet de limiter les flux en provenance lointaine ;
- Les progrès technologiques permettent à présent de vivre ces évènements en groupe (fan zone, bars, etc.), avec des émotions partagées plus intenses que devant des postes de télévision privés ;
- La réorganisation d’évènements sportifs répartis dans les divers pays sélectionnés à la compétition plutôt qu’un seul, comme dans le cas des championnats classiques avec match à domicile et à l’extérieur. Dans ce cas, le déplacement des équipes entre les pays permettrait de réduire les déplacements des spectateurs et l’accès aux matchs serait permis à davantage de spectateurs locaux.
Si la transition climatique induit des contraintes physiques et limite la possibilité (relativement récente) d’aller au bout de la Terre pour voir un match, elle n’annihile en rien l’esprit sportif et les émotions associées. Rappelons nous à quel point la victoire de la France lors de la coupe du monde de football de 2018 a réjoui le pays pendant plusieurs semaines, alors que beaucoup ne s’étaient pas déplacés en Russie.
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