Voyager bas carbone, comment concilier vacances et monde bas carbone?
Notre FAQ sur le tourisme - Partie 2
Quels sont les modes de transport les moins polluants pour partir en vacances ?
Habituellement, pour comparer les émissions de CO2 des modes de transport, on calcule les émissions en CO2/p.km, c’est-à-dire la quantité de CO2 émise pour transporter une personne sur 1 km. En utilisant cette méthode, le train se démarque en tant que mode de transport bas carbone. Sur la longue distance, ce qui correspond aux trajets réalisés pour les vacances, l’avion est le plus émissif. On remarque également que la voiture reste un mode de transport très émissif.
Cependant, avec un temps dédié aux vacances défini (un week-end, une semaine, deux semaines, etc.), le choix de la destination se fait en fonction de la durée du trajet pour l’atteindre. En effet, une personne prête à faire 4h de trajet pour partir en vacances n’émettra pas autant selon qu’elle prend le TGV pour se déplacer en France, ou l’avion pour rejoindre une destination plus lointaine. Le temps de trajet apparaît alors, avec bien sûr le coût, comme le véritable critère de choix plus que la distance parcourue. Il est donc intéressant de s’intéresser aux émissions de CO2 pour une heure de trajet. On remarque alors que l’avion se démarque très nettement comme le mode de transport le plus émissif par heure de trajet. Le train reste le mode de transport le moins carboné dans cette approche. Le problème de l’avion ne sont donc pas tant ses émissions par kilomètre, mais bien le fait qu’il favorise des trajets sur des distances qui ne seraient pas envisagées sinon !
Comment réduire les émissions carbone de mes vacances ?
Comme mentionné dans notre première FAQ, le transport représente la majeure partie des émissions carbone du tourisme. Cela se retrouve d’ailleurs dans les émissions de quelques profils types :
Ainsi, pour réduire les émissions carbone d’un voyage, le mode de transport choisi ainsi que la distance parcouruesont les principaux déterminants. Une manière de réduire fortement ses émissions est tout simplement de voyager moins souvent et rester plus longtemps sur place : par exemple, en passant une semaine à Lisbonne plutôt que de s’éparpiller sur 4 grands weekends dans des capitales européennes. Ou en partant sur un autre continent tous les 3-4 ans plutôt que tous les ans. En réduisant son nombre total de trajets en avion, et la distance parcourue, on réduit les émissions totales. Cela permet également de connaître les destinations et leurs habitants plus en profondeur.
Après les transports, l’hébergement, l’achat de biens et la restauration viennent s’ajouter aux émissions. Sur ces postes, certains choix alourdissent la facture carbone du séjour. Ainsi, résider dans un hôtel haut de gamme plutôt que dans un hôtel milieu de gamme multiplie les émissions carbone de l’hébergement par 2. Si l’on veut encore plus réduire les émissions liées à ce poste, choisir la tente au camping permet une importante diminution[1]. Au sein d’une même catégorie d'hébergement, il est intéressant de privilégier des établissements porteurs d’un label, à l’instar de l’Ecolabel, harmonisé au niveau européen. Celui-ci comporte des critères sur la réduction de la consommation d’énergie et d’eau, la gestion des déchets, ainsi que sur la gestion générale de l’établissement.[2] De nombreux autres labels existent et il est important de comprendre les critères utilisés pour leur attribution, afin de savoir ce qu’il garantit.
Enfin, concernant l’alimentation, gardons en tête que les options végétariennes permettent également de diviser par 10 ce poste d’émissions, en passant de plus de 6 kgCO2e pour un repas avec du bœuf à 0,5 kgCO2e pour un plat végétarien[3], et ceci est valable au quotidien mais aussi pendant les vacances !
La solution passera-t-elle par une somme d’actions individuelles ou y a-t-il des leviers collectifs ?
Pour voyager bas carbone, certains leviers relèvent directement de l’individu comme le choix de la destination, du mode de transport ou du type d'hébergement pour partir en vacances (voir question précédente). La fréquence avec laquelle on décide de partir loin est aussi un levier clé sur lequel nous pouvons agir individuellement. Il appartient ici à l’individu de faire un choix éclairé et responsable afin de limiter son impact. De plus en plus, des agences de voyages et des moteurs de recherche comme Mollow[4], Greengo[5], En immersion[6], Hourrail[7] ou Ebooqueen[8] se spécialisent pour proposer une offre touristique qui prend en considération ces enjeux.
Mais tout ne dépend pas du choix du voyageur et certains aspects, plus sociétaux, ont trait à l’imaginaire collectif que nous faisons des vacances, qui repose souvent sur le voyage lointain. Nous pouvons en tant que société changer ces idées reçues et promouvoir d’autres approches comme le “slow travel” (voyage lent en anglais) qui privilégie le temps passé, en mettant l’accent sur la connexion avec l’endroit.
Le gouvernement et les institutions jouent également un rôle crucial en mettant en place des stratégies pour promouvoir un tourisme bas carbone. C’est le cas de l'engagement de la filière vélo pour faire de la France la 1ʳᵉ destination mondiale pour le tourisme à vélo en 2030[9]. D’autres leviers passent par le développement des infrastructures de transport public et le soutien aux hébergeurs et restaurateurs pour accélérer la transition écologique. Les politiques publiques peuvent mettre en place des incitations afin de rendre les moyens de transport bas carbone plus avantageux comme le Pass rail[10] et des réductions associées sur les attractions touristiques comme en Normandie[11], et travailler sur la sensibilisation et la communication par exemple en réglementant la publicité des compagnies aériennes ou de croisière.
C’est grâce à la prise de conscience et à des actions à toutes les échelles, que le tourisme véritablement durable pourra devenir à la fois un horizon désirable et une réalité concrète.
Le tourisme bas carbone est-il plus cher ?
Un tourisme bas carbone est caractérisé principalement par le mode de transport, et également le mode de tourisme sur place (cf. question 7 et 8)
Sur place, les modes de tourisme bas carbone sont généralement moins chers puisqu’ils sont moins énergivores, et utilisent moins d'infrastructures. Ainsi, dormir en tente revient moins cher que dormir dans un hôtel modeste, et à fortiori un hôtel de luxe, ce qui va de pair avec les émissions. Les services additionnels - et donc les coûts - sont à l’origine de l’impact plus élevé généré. De même, une randonnée coûtera moins cher qu’un loisir utilisant de l’énergie (sortie en quad, bateau à moteur) ou des infrastructures (parc aquatique, ski).
Concernant les déplacements, cette corrélation entre prix et émissions de CO2 n’est pas toujours vraie, et les exemples de trajets plus chers en train qu’en avion ou en voiture foisonnent. Gardons en tête néanmoins que le transport par TGV et le transport aérien utilisent des modèles pricing sophistiqués, et qu’il est difficile d’effectuer des comparaisons tant le jour, l’anticipation du voyage, ou la stratégie pricing de l’entreprise influencent le prix. Ainsi, on pourrait facilement trouver des contre-exemples avec des billets promotionnels de TGV démarrant à 16€ sur OuiGO.
En regardant des moyennes (qui cachent une grande diversité de prix) établies par l’autorité de régulation des transports, un touriste bas carbone dépensera un peu plus pour atteindre une même destination en train qu’un touriste qui l’atteint en avion low cost, mais moins qu’un touriste qui passe par une compagnie aérienne classique.
Néanmoins, cette analyse cache une partie de la vérité, puisque le prix augmente généralement avec la distance. Or, les voyages bas carbone favorisent les destinations plus proches, comme expliqué en question 7, plus que la distance, la durée du trajet détermine généralement le choix des vacances. Si l’on ramène le coût du voyage par heure de trajet, on obtient une meilleure corrélation avec les émissions, avec un coût du transport aérien très élevé, et un transport ferroviaire (hors TGV) ou en autocar moins cher que le transport routier, même si le TGV reste onéreux (voir figure suivante).
Les impacts sur le secteur touristique français
La France peut-elle rester la 1ère destination touristique mondiale dans un monde bas-carbone ?
Dans la foulée des JO, la France aimerait bien conserver sa médaille d’or du tourisme, dont nous nous gargarisons régulièrement, mais de quoi parle-t-on précisément ? Il s’agit du nombre d’arrivées de touristes internationaux, et la France était encore première en 2023 avec 100 millions de touristes[12]. Est-il viable de penser que nous allons pouvoir rester premier tout en devenant un pays neutre en carbone ? Non, car les touristes internationaux sont responsables de la majeure partie des émissions du tourisme en France (cf question 3), et il est illusoire d’envisager de pouvoir continuer à faire augmenter ce chiffre tout en se décarbonant radicalement.
Pour autant, est-ce réellement un problème ? Ce qui compte in fine est surtout l’activité économique, culturelle, et sociale française associée au tourisme. Or, en matière de recettes liées au tourisme international - indicateur partiel mais donnant un ordre de grandeur - la France n’est que 5ᵉ avec 63,5 Md$, loin derrière les États-Unis avec 176 Md$. Nous pourrions avoir moins d’arrivées de voyageurs étrangers, mais qui restent plus longtemps chez nous, pour arriver au même développement avec moins de transports à la clé. Ou bien des voyageurs étrangers venant de moins loin comme on a pu le constater sur 2018-2022 où, Covid oblige, la baisse des émissions du tourisme en France (près de 16% !) s’est expliquée majoritairement par un report de tourisme asiatique et américain vers du tourisme intra-européen.[13]
D’autre part, la première nation dont dépend le tourisme français est… la France ![14] Le tourisme domestique représente 70% du PIB touristique, et est bien moins émissif que le tourisme étranger de longue distance.
Ainsi, tout est une question d’indicateur, et la France pourrait tout à fait maintenir une activité touristique importante (5% de l’emploi total du pays à l’heure actuelle[15]) tout en se décarbonant ; cela vaut bien une médaille.
Est-ce que les Français sont de grands voyageurs ?
Les Français·es sont des globe-trotteurs : plus d’un voyage sur cinq a lieu à plus de 500 km de chez eux, et la part des voyages longs va en augmentant. Pour preuve, les voyages à plus de 900 km ont augmenté de 68 % entre 2008 et 2019, tandis que ceux de moins de 200 km ont réduit de 10 %[16] dans le même temps !
Cette augmentation des voyages longs est notamment tractée par l’afflux des voyages vers étranger et les DOM qui ont augmenté de 28 %[17] sur la même période, permis par un recours accru à l’aviation. Entre 2008 et 2019, alors que le nombre de voyages en train a diminué de 15 %[18], le nombre de voyages en avion a augmenté de 71 %[19]. Les Français·es voyagent 3 fois plus en avion que la moyenne mondiale, et alors qu’ils représentaient moins de 1 % de la population mondiale[20] en 2018, ils ont réalisé 2,6 % des passagers.kilomètres parcourus dans le monde en avion cette année-là[21] ! Un chiffre qui cache néanmoins une disparité sociale car seulement un tiers des habitants de l’Hexagone prend l’avion dans l’année[22] et que plus simplement seulement une petite majorité des Français (60%) ont l’occasion de partir en vacances[23].
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