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octobre 2024

Le changement d'usage des sols

Une problématique climatique plus large et pertinente que la seule déforestation

Auteurs et autrices : Clément Ory, Corentin Leroux

Résumé exécutif

Il est courant d’entendre parler de déforestation dans la presse lorsqu’il s’agit d’invoquer les causes du changement climatique. S’il est vrai que la déforestation contribue de façon importante à l’augmentation des gaz à effet de serre, il est aussi essentiel de se questionner sur les différentes destructions d’écosystèmes naturels à l’heure actuelle dans le monde et d’évaluer leur impact sur le dérèglement climatique.

C’est l’objet de cette publication qui :

  1. décrit d’abord les notions techniques clés lorsqu’il s’agit d’étudier l’impact lié au changement d’usage des sols. Comment évalue-t-on l’impact carbone si les biens que je consomme en France génèrent par exemple une destruction des mangroves en Asie du Sud-Est ? Dans quelle mesure une terre anciennement déforestée puis nouvellement replantée est-elle comparable à une forêt vierge ?
  2. détaille les enjeux carbone de quatre écosystèmes naturels dans le monde : les mangroves, les prairies, les tourbières et les forêts tropicales humides. Ainsi, comme l’illustre le tableau ci-dessous, on constate les gisements colossaux de carbone que contient chaque écosystème.

On note par ailleurs que les prairies contiennent un stock de carbone bien plus important que les forêts tropicales, avant tout en raison des surfaces importantes qu’elles représentent.

De la même façon, les tourbières, qu’on peut définir comme des zones humides caractérisées par une végétation se développant sur un sol en permanence saturé d’eau stagnante, représentent près d’un tiers des stocks mondiaux de carbone du sol de la planète.

Cette publication vise ainsi à définir un vocabulaire commun et à mettre au même niveau les enjeux liés à la destruction des écosystèmes naturels, quels qu’ils soient. 

Puis deux autres publications suivront dans les prochaines semaines afin de :

  • comprendre comment les acteurs agricoles et agroalimentaires français peuvent intégrer ces enjeux dans le cadre de leurs engagements climatiques ;
  • questionner dans un second temps la pertinence des labels de certification environnementale, au travers des cas du soja et du cacao.
A noter : les stocks de carbone, présentés dans le tableau ci-dessus et les fiches associées aux différents écosystèmes, se réfèrent aux stocks contenus dans le sol et la biomasse aérienne.
World Wildlife Fund | World Resources Institute | Carbon Disclosure Project.

Messages clés

Si la déforestation et ses impacts sont aujourd’hui assez médiatisés, il est indispensable d’élargir le sujet à l’ensemble des écosystèmes naturels, et de privilégier le terme de changement d’usage des sols plutôt que déforestation, au sens où tous les types d’écosystèmes dégradés et/ou détruits par l’action humaine peuvent ainsi être considérés : forêts, prairies, savanes, mangroves, tourbières, etc.

Ainsi, en considérant l’ensemble des écosystèmes et pas seulement les forêts tropicales, les réservoirs mondiaux de carbone sont multipliés par plus de cinq.

Même si le changement d’usage des sols tend à concerner davantage l’Asie du Sud-Est, l’Afrique et l’Amérique du Sud, c’est un sujet de premier plan pour l’Europe et l’Occident car de nombreux produits étant à l’origine de changement d’usage des sols sont actuellement consommés chez nous, soit par l’élevage soit directement dans les produits transformés : l'huile de palme, le soja, le cacao, le riz, le caoutchouc, etc.

Lorsqu’on analyse les impacts carbone liés à la destruction des principaux écosystèmes, on peut faire ressortir malheureusement des chiffres toujours plus effarants les uns que les autres :

  • 420 millions d’hectares, c’est la totalité de la surface déforestée dans le monde depuis 1990, soit plus de 7 fois la taille de la France.
  • 2/3 des mangroves détruites dans le monde sont dues à la consommation de crevettes, d’huiles de palme et de riz.
  • Seulement 8% des prairies dans le monde sont protégées d’un point de vue environnemental, alors que leur stock de carbone est estimé à 2,6 fois plus que les forêts tropicales humides.
  • Bien que couvrant seulement 3% des surfaces émergées sur Terre, les tourbières contiennent près de 613 Gt de carbone, soit près d’un tiers des stocks mondiaux de carbone du sol de la planète.

Pour découvrir toute notre publication, téléchargez-là ci-dessous.


Agriculture et Agro-alimentaire