Les liens entre le tourisme et le réchauffement climatique
Notre FAQ sur le tourisme - Partie 1
Quel est l’impact du tourisme sur le climat ?
Après deux années marquées par la pandémie et les restrictions de voyages, le tourisme international a retrouvé ses niveaux d’avant COVID, confirmant l’attractivité de la France. Or, cette première place a un coût élevé, notamment sur le changement climatique. En 2022, les émissions du secteur du tourisme en France ont atteint 97 millions de tonnes de CO2e, d’après l’étude la plus récente sur le sujet[1]. Cela équivaut à l’empreinte carbone annuelle de 10 millions de Français et Françaises.
Environ la moitié de ces émissions, soit 46 millions de tCO2e, sont des émissions directes ayant lieu sur le territoire français. Le secteur du tourisme est ainsi responsable de 11% de l’inventaire national d’émissions de la France[2]. A titre de comparaison, le secteur du tourisme contribue à 4% du PIB et représente une consommation intérieure de 7%. Ainsi, le secteur du tourisme en France apparaît comme plus intensif en GES par unité de PIB que la moyenne française.
Et sur le reste ?
L’impact du tourisme va bien au-delà du climat, notamment à cause des activités sur place. En effet, les activités touristiques peuvent entraîner d’autres impacts environnementaux tels que la surconsommation de ressources, une mauvaise gestion des déchets ou un impact considérable sur la biodiversité, ainsi que des impacts sur les populations locales dans certaines régions.
Les vagues touristiques induisent une surconsommation de diverses ressources telles que l’eau, l’énergie et les matériaux pour la construction. L’impact d’une activité sur l’eau dépend à la fois du lieu de l’activité, du volume prélevé et de l’origine de l’eau consommée. Certaines activités touristiques ont lieu dans des zones arides à très arides (Bassin méditerranéen, Moyen-Orient, Afrique sub-saharienne, etc) et consomment un volume d’eau important (Piscine, agriculture, etc) et prélèvent régulièrement l’eau de nappes en stress hydrique.
Le tourisme peut-être également à l’origine d’une quantité importante de déchets mal gérés. Par exemple, la mer Méditerranée voit son riche patrimoine naturel se dégrader[3], notamment à cause du tourisme et de ses déchets. La quantité de plastique en mer augmente de 40% lors de saisons touristiques par exemple[4].
Le tourisme génère également une pollution des eaux et des sols, à cause de rejets excessifs d’eaux usées dans des zones qui accueillent une quantité de touristes supérieure à leur capacité. L’île de Boracay aux Philippines a refusé en 2018 les touristes pendant 6 mois à cause d’une quantité excessive de rejet d’eaux usées des restaurants et hôtels dans la mer[5].
L’impact sur la biodiversité du tourisme est également considérable. En plus des impacts cités ci-dessus qui génèrent une érosion de la biodiversité, le développement d’infrastructures (routes, bâtiments, aéroports, etc) contribue au morcellement des territoires et à la fragmentation de l'habitat des espèces animales et végétales. Elles se retrouvent isolées avec des difficultés à se déplacer et à se reproduire[6].
Enfin, bien que le tourisme soit un très fort créateur d’emploi qui contribue au développement économique de certaines régions, ses impacts sociaux peuvent être discutés. En effet, le tourisme de masse génère aussi des tensions et des hyper dépendance économique de certaines régions, avec par exemple une forte hausse des prix de l’immobilier, une perte de l’identité locale, une détérioration du patrimoine culturel et de la qualité de vie, etc.
Ces effets sont en grande partie liés à la répartition saisonnière et géographique du tourisme. Mal distribué, le tourisme devenu “de masse” a des impacts sociaux et environnementaux importants. En France par exemple, 80% de l’activité touristique se concentre sur seulement 20% du territoire[7]. Alors que certains territoires bénéficient peu de la manne financière du tourisme, certains cherchent à l’inverse à limiter ces flux. Un rééquilibrage est donc souhaitable.
Quels sont les principaux postes d’émissions du tourisme ?
Les émissions du secteur du tourisme proviennent majoritairement (∼70%) de la mobilité des touristes, en particulier aux trajets aller-retour vers les lieux de séjour (∼60%). Le transport aérien, en raison des longues distances parcourues et de son intensité carbone élevée, représente à lui seul un tiers des émissions du tourisme en France.
Les visiteurs non-européens représentent 3% des arrivées, mais sont responsables de 20% des émissions du secteur. Cela s’explique par une intensité par nuitée / journée 3 fois plus élevée qu’un visiteur européen et 6 fois plus élevée qu’un visiteur venant de France, notamment à cause des émissions induites par le transport : les visiteurs venant de l’étranger parcourent en effet des distances plus importantes, et majoritairement en avion pour les visiteurs venant d’hors Europe. La durée moyenne de séjour, certes plus élevée pour un visiteur non-européen, ne l’est pas suffisamment pour « diluer » dans le nombre de nuitées le surplus d’émissions de transport.
La voiture représente environ un tiers des émissions du secteur du tourisme (26% liées au déplacement origine-destination et 7% sur place). En particulier, les touristes français utilisent principalement la voiture : leur mobilité est à décarboner.
L’hébergement, les achats de biens et l’alimentation sont à l’origine de 25% des émissions du secteur (respectivement 8%, 9% et 8%).
Quels sont les objectifs de décarbonation du secteur ?
Pour respecter les Accords de Paris et limiter la hausse de la température mondiale, tous les secteurs de l’économie, y compris le tourisme, doivent se décarboner. L’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), destinée à promouvoir et à développer le tourisme, n’a pas fixé d’objectif de décarbonation pour le secteur. Dans un rapport récent[8], l’organisation rappelle l’importance de la réduction des émissions du secteur. Paradoxalement, elle anticipe une hausse des émissions liées au transport de 25% entre 2016 et 2030.
La Déclaration de Glasgow, adoptée lors de la COP26 constitue l’avancée la plus forte à ce jour. Plus de 850 organisations[9] (gouvernements, entreprises, institutions financières…), s’engagent volontairement à réduire de moitié leurs émissions d’ici à 2030 et à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.
Bien qu’encourageante, cette déclaration repose sur des engagements volontaires. Sans cadre juridique ou engagement du secteur dans son intégralité, son efficacité restera limitée.
En France, le tourisme, secteur transverse, ne fait pas l’objet d’une trajectoire spécifique au sein de la Stratégie Nationale Bas Carbone.
Il semblerait donc que la trajectoire de décarbonation du secteur du tourisme repose essentiellement sur des initiativesindividuelles ou collectives et de la coopération avec les trajectoires de décarbonation des autres secteurs comme le transport par exemple.
Le changement climatique va-t-il impacter le secteur touristique ?
Comme toutes les activités économiques, le tourisme va subir les conséquences du changement climatique.
Le premier impact, le plus important, est celui de l’attractivité des destinations. Certaines villes ou régions qui se sont construites autour du tourisme vont probablement voir leur attrait se réduire à mesure que le changement climatique progresse. En France, c’est notamment le cas des stations de sport d’hiver dont l’enneigement est condamné à diminuer. D’autres destinations, plus estivales, sont aussi à risque. Ainsi les destinations “soleil” verront probablement leur fréquentation diminuer à mesure que les canicules estivales deviendront la norme, au profit d’autres destinations plus fraîches. La carte suivante[10], du Joint Research Center (Organisme Européen) illustre bien cette probabilité : le Royaume-Uni et la Scandinavie pourraient devenir les destinations à la mode ! Et la saisonnalité de la demande de tourisme pourrait aussi être affectée.
Plus indirectement, le tourisme dépend d'activités connexes au premier rang desquels le transport de passager. Hors que ça soit la route, le ferré ou l’aérien, aucun mode de transport n’échappera aux impacts du changement climatique[11].
Sur l'année, est-ce que les vacances sont un "moment” particulièrement polluant ?
En moyenne, chaque Français émet environ 10 tonnes de CO2e (équivalent CO2), soit environ 27 kgCO2e/jour[12]. Ces émissions proviennent de 5 grandes catégories : déplacement, alimentation, logement, achats et dépenses publiques.
Selon le type de vacances, l’impact sur ces différentes catégories peut varier, mais les déplacements, le logement et les achats sont les plus concernés.
Prenons quelques exemples pour comparer l’empreinte carbone de type de vacances à l’empreinte carbone moyenne annuelle d’un Français.
- Un voyage à New-York en avion : Un Français qui part une semaine à New-York va en moyenne, avoir une empreinte carbone d’environ 2,1 tonnes de CO2e. Soit environ 300 kgCO2e/jour.
- Un voyage en voiture dans sa région : Un Français qui passe 5 jours à visiter sa région en voiture aura, en moyenne, une empreinte carbone totale d’environ 160 kgCO2e. Soit environ 32 kgCO2e/jour.
Ainsi, ramené à notre échelle individuelle et à notre propre bilan carbone, ces comparaisons montrent bien l’impact majeur que les vacances peuvent avoir. Cela souligne aussi l’incompatibilité de nos modes de vacances actuels avec l’objectif de l’Accord de Paris, qui vise à limiter les émissions à 2 tonnes de CO2/an soit environ 5 kgCO2e/jour.
Dans la prochaine section, nous détaillerons des pistes pour concilier le plaisir des vacances dans un monde bas carbone.
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