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19 mai 2021

Avant la pandémie, la voiture représentait plus de la moitié des trajets domicile-travail de moins de 2 km

Cet article a initialement été publié dans notre newsletter Décryptage Mobilité du 20 avril 2021. Pour recevoir par mail les prochains articles dès leur publication, abonnez-vous dès maintenant.

L’INSEE a publié en début d’année une note sur l’importance de la voiture pour les déplacements domicile-travail [1]. Elle s’appuie sur les recensements annuels de 2017 afin d’analyser les pratiques d’avant la pandémie pour les actifs ayant un emploi et se déplaçant à moins de 150 kilomètres pour aller travailler, soit 24,6 millions de personnes. L’INSEE étudie les corrélations qui peuvent exister entre le mode de transport et la distance à parcourir, la catégorie de commune de résidence, ainsi que la catégorie socioprofessionnelle.

Principal résultat : la voiture reste majoritaire, dans l’ensemble des déplacements et peu importe la distance parcourue. Ainsi dans l’ensemble, 74% des trajets domicile-travail sont réalisés en voiture, quand seulement 16% le sont en transport en commun et 8,5% en mode doux (marche à pied et vélo).

Pour caractériser plus finement l’usage de la voiture, il est intéressant de regarder l’évolution des parts modales en fonction de l’éloignement du lieu de travail. Notons déjà que deux tiers des actifs effectuent plus de 5 km pour se rendre à leur travail. Et sans surprise, plus les actifs vivent loin de leur lieu de travail, plus ils plébiscitent la voiture, avec par exemple 80% des trajets ayant une distance supérieure à 5 km qui sont effectués en voiture.

Si la voiture règne sur les déplacements longs, qu’en est-il pour les plus petites distances ? On pourra s’étonner que la voiture reste prédominante sur les petites distances : 60% des déplacements de moins de 5 km sont effectués en voiture, à comparer avec 23% pour les modes doux et 15% en transport en commun, le reste des déplacements étant faits en deux-roues. Même pour les distances de moins de 2 km, la voiture reste le principal mode de transport avec 53% des déplacements. Si la part modale des transports en commun reste relativement stable au-delà de 5 km (16%), c’est bien sûr les modes doux qui voient leur part modale chuter avec seulement 1,5% de ces types de trajets.

Il est intéressant de remarquer que l’évolution temporelle est (malheureusement) relativement faible, illustrant l’inertie dans notre système de mobilités : entre les études de 2015 et 2020, le recours à la marche à pied a reculé de 0,2%, et celui de la voiture de 0,9%, au profit du vélo et des transports en commun. Une bonne nouvelle : le vélo gagne près de 0,9% de part modale sur la période dans l’ensemble, cette augmentation étant plus forte dans les grandes villes avec un gain de 2%. Ceci peut s’expliquer par la multiplication des infrastructures associées au vélo, notamment dans les grandes villes. Ce rythme d’augmentation de la part modale du vélo est en phase avec les objectifs des pouvoirs publics, comme récemment souligné dans une publication de Carbone 4 [2].

L’analyse faite par l’INSEE met également en avant la variabilité au sein des catégories socioprofessionnelles des actifs. En ce qui concerne les distances parcourues : les cadres, les professions intermédiaires et les ouvrier·e·s effectuent des distances élevées, au contraire des artisan·e·s et des agriculteur·ice·s qui vivent près de leur activité. Ces dernier·e·s recourent toutefois de manière plus importante à la voiture, notamment sur des petites distances, avec ¾ des déplacements de moins de 5 km effectués en voiture. Plusieurs raisons à cela : d’une part ces catégories professionnelles sont amenées à se déplacer sur des distances variables, qui peuvent aller bien au-delà de leur lieu de travail ; d’autre part les agriculteur·ice·s travaillent dans des zones rurales et ont très certainement moins accès à des transports en commun. À l’inverse les cadres, qui vivent souvent dans des espaces urbains et connectés, ont recours beaucoup plus souvent aux transports en commun ainsi qu’aux modes de déplacement doux.

Cette note de l’INSEE propose des pistes de réflexions intéressantes visant à expliquer le recours important à la voiture sur de courtes distances. 22% des actifs ayant un emploi à la localisation variable, le recours à la voiture s’explique souvent par l’éloignement changeant vis-à-vis du domicile. Ces actifs peuvent être par exemple des agriculteur·ice·s, des artisan·e·s, des commerçant·e·s, des personnel·le·s de service aux particuliers ou encore des professionnel·le·s de santé. Concernant les autres actifs, le recours à la voiture s’explique souvent par le besoin de déplacements chainés (par exemple pour déposer ses enfants à l’école), pour des raisons de santé ou plus simplement par choix ou habitude.

Cette étude reflète les difficultés d’une transition bas carbone de nos mobilités : réduire les émissions nécessite un fort report modal de la voiture vers les modes doux ainsi que les transports en commun, et l’on voit bien dans cette étude que le défi est encore immense. Au-delà du report modal, nous n’oublions pas qu’il est tout aussi nécessaire de continuer d’améliorer l’efficacité énergétique des véhicules ainsi que leur taux d’occupation, via le covoiturage par exemple. Enfin, comme cette étude date d’avant la pandémie, espérons que le développement du télétravail, principalement forcé pendant la pandémie, aura des effets significatifs et durables sur les comportements de mobilité après la pandémie, en réduisant le volume de déplacements de façon choisie.

  Article rédigé par Gabriel Manhes (Consultant) gabriel.manhes@carbone4.com 

Sources : [1] « La voiture reste majoritaire pour les déplacements domicile-travail, même pour de courtes distances », note de l’INSEE de janvier 2021 [2] « L’État français se donne-t-il les moyens de son ambition climat ? », publication de Carbone 4 de février 2021


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