Impacts des activités économiques sur la biodiversité marine : quels outils de mesure et quelles limites ?
Introduction
En 2019, l’IPBES indiquait que « les écosystèmes marins, des zones côtières à la haute mer, subissent aujourd’hui l’influence des activités humaines ; l’étendue et l’état des écosystèmes littoraux accusent à la fois des pertes historiques importantes et un déclin actuel rapide »[1]. Comme pour la biodiversité terrestre, la situation est alarmante : seuls 13 % des espaces marins globaux sont épargnés par la pression humaine[2] ; plus d'un tiers de tous les mammifères marins sont menacés ; 38 % des stocks halieutiques sont surexploités[3].
Dans ses deux derniers rapports publiés en 2024[4], l’IBPES souligne qu’à l'échelle mondiale, de nombreux écosystèmes marins ont été surexploités et dégradés par les activités humaines et évoque l’amélioration de la gestion intégrée des paysages terrestres et marins comme solution pour inverser la courbe de perte de biodiversité marine.
Plus tôt dans l’année 2024, en septembre, le "Planetary Health Check" (bilan de santé de la planète) évoquait le dépassement imminent d’une septième limite planétaire[5], le seuil d’acidification des océans. Comme les autres limites planétaires, il s’agit d’un seuil physique au-delà duquel l’environnement risquerait d’être déstabilisé de manière irréversible, avec des impacts majeurs et imprévisibles pour les êtres vivants.
En 2024 également, le gouvernement français a décidé que l’année 2025 serait l’Année de la Mer en France. Cette année sera ponctuée d’événements partenaires et d’un déploiement d’actions et projets labellisés « La Mer en commun ». La troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan se tiendra notamment à Nice en juin 2025, avec pour thème principal d’« accélérer l’action et mobiliser tous les acteurs pour conserver et utiliser durablement l’océan ».
Pour bien démarrer cette Année de la Mer, Carbone 4 vous propose de faire le point sur le niveau de connaissance et de maîtrise des impacts des activités humaines sur la biodiversité marine, les outils à disposition et leurs limites.
Définition de la biodiversité marine
La vie est apparue sur Terre dans les océans, il y a environ 3,8 milliards d’années. Ce n’est que bien plus tard que la vie est née sur les terres émergées (vers -400 millions d’années)[6]. Les mers et les océans représentent près de 71 % de la surface du globe et abritent une biodiversité complexe encore peu connue. Des chercheurs estiment que 8,7 millions d’espèces existent sur Terre, dont 2,2 millions d’espèces marines[7]. A ce jour, moins de 280 000 espèces marines ont été recensées, soit 13 % de l’ensemble des espèces recensées sur la planète[8].
La Convention sur la Diversité Biologique (CDB) définissait en 1992 la biodiversité comme la « variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie ».
La biodiversité marine désigne donc l’ensemble des êtres vivants marins, les écosystèmes[9] dans lesquels ils vivent et les interactions des espèces entre elles et avec leurs milieux[10]. Comme la biodiversité terrestre, la biodiversité marine se déploie sur des écosystèmes très variés de pleine eau ou rattachés à des habitats côtiers (estuaires, lagunes, récifs, mangroves) ou bien hauturiers (plateaux, plaines océaniques et abysses). Parmi les écosystèmes marins, on retrouve, par exemple : les récifs coralliens qui abritent une grande diversité de poissons, coraux, mollusques et autres espèces marines ; les estuaires où les eaux douces des rivières rencontrent les eaux salées des océans, créant des habitats uniques pour de nombreux poissons, crustacés, et oiseaux ; et les abysses, des zones profondes et inaccessibles des océans, où vivent des espèces adaptées aux conditions extrêmes de pression et de température, comme des poissons des abysses, des coraux froids et des invertébrés uniques.
Cette biodiversité marine présente de nombreuses particularités qui en font un sujet complexe à étudier : la difficulté d’accès à l’environnement pour l’étudier, la structure tridimensionnelle des mers et des océans, la grande mobilité des espèces marines qui peuvent migrer sur de longues distances, les relations symbiotiques entre les espèces et la complexité des chaînes alimentaires.
Pourquoi la biodiversité marine est essentielle à l’humanité ?
Les impacts des activités humaines sur la biodiversité marine
La biodiversité marine, menacée par des pressions multiples, joue pourtant un rôle central dans le fonctionnement du système Terre. Elle se dégrade à une vitesse et une intensité inégalées jusqu’ici. A titre d’exemples, un tiers des espèces contribuant à la formation des récifs coraliens est menacée d’extinction[11] et 38%[12] des stocks halieutiques mondiaux sont surexploités.
Les activités humaines exercent cinq pressions (directes ou indirectes) sur les milieux marins :
- la surexploitation des ressources marines
- la destruction des milieux naturels,
- le changement climatique (réchauffement et acidification des océans)
- la pollution (pollution plastique, pollution chimique)
- l’introduction d’espèces exotiques envahissantes
Le Figure 1 décrit les activités humaines associées à chaque pression de l’IPBES et présente quelques chiffres et les conséquences néfastes sur la biodiversité marine ; le déclin des populations d’espèces marines est de l’ordre de 56 % depuis les années 1970.[13]
Les services écosytémiques de la biodiversité marine
Les milieux marins sont une composante essentielle des cycles des éléments, notamment le cycle de l’eau, dont ils constituent le principal réservoir. Le processus de photosynthèse permet au phytoplancton, algue microscopique présente dans les océans, de fournir les deux tiers de l’oxygène de l’air atmosphérique consommé par le vivant chaque année. En transformant les éléments nutritifs présents dans l’eau en biomasse (source d’énergie), le phytoplancton est à la base des chaînes alimentaires marines.
Les océans sont également un puits de carbone majeur puisqu’ils absorbent un quart des émissions de gaz à effet de serre anthropiques. Ce processus se produit via deux mécanismes : la dissolution du CO2 dans l’eau et la photosynthèse opérée par les algues. Si ce processus est bénéfique pour limiter le réchauffement climatique, la séquestration de carbone en quantité élevée dérègle les océans : ils se réchauffent, s’acidifient et leur concentration en oxygène dissous diminue. On comprend ici que les phénomènes climatiques entraînent des réactions en chaîne dans le milieu marin, pouvant s’autoalimenter et s’amplifier, constituant ainsi une boucle de rétroaction positive.
Le dugong, espèce emblématique des pressions exercées sur la biodiversité marine, dont le rôle est essentiel à la vie marine[14]
Le dugong est un mammifère marin dont l’aire de répartition s’étend de l’Afrique de l’Est au Pacifique Ouest. Il est un exemple d’espèce menacée par les pressions exercées par les activités humaines, bien que sa présence dans le milieu marin soit essentielle au bon fonctionnement de ce dernier.
Le dugong est menacé par de multiples pressions :
en dépit des interdictions de chasse du dugong dans de nombreux pays, cette espèce reste victime de braconnage et de pêches accidentelles,
l’étendue des herbiers marins, dont il dépend, se réduit année après année,
en tant qu’espèce côtière, le dugong côtoie des zones de trafic maritime intense et subit régulièrement des collisions mortelles avec des embarcations,
ses habitats côtiers sont en réduction, en raison du tourisme, de la pollution et de l'urbanisation des côtes.
Son rôle est pourtant essentiel dans le fonctionnement des écosystèmes marins : en ingérant 30 à 40 kg d’herbe marine par jour, il participe au brassage des fonds marins et contribue à assurer la bonne santé des écosystèmes. Son action bénéficie notamment aux tortues vertes, aux poissons (napoléons, bossus, etc.), aux halophytes. Le dugong est une espèce parapluie, ce qui signifie que son étendue permet la protection d'autres espèces. La survie du dugong est donc essentielle à la survie de nombreux habitats et espèces ; cela laisse présager des transformations en cascade que sa disparition pourrait entraîner.
L’ensemble des bénéfices que tire l’humanité de la biodiversité sont classés en 4 catégories de services écosystémiques :
Les conséquences de la dégradation des milieux marins sur nos activités
Les êtres humains sont fortement dépendants des services écosystémiques marins, dont la valeur totale a été estimée par le WWF à 24 000 milliards de dollars par an[15]. Ce produit marin brut, qui représente la valeur économique annuelle des océans, est calculé de la même manière que le produit intérieur brut national. Il place les océans au 7ème rang des économies mondiales. Plusieurs activités et actifs sont intégrés dans ce calcul : la production directe des océans (stocks halieutiques, mangroves, récifs coralliens, herbiers marins), le commerce et le transport (voies de navigation) ainsi que les actifs adjacents (production des littoraux, absorption du carbone). Notons qu’il s’agit d’une estimation basse car les formes de production qui ne sont directement générées par les océans sont exclues des calculs (ex : pétrole et gaz sous-marins, énergie éolienne).
Au-delà des questions éthiques que la dégradation des écosystèmes marins par les activités humaines soulève, les pressions exercées sur la biodiversité marine altèrent progressivement les écosystèmes, leur fonctionnement et par conséquent notre capacité à bénéficier de manière pérenne des services écosystémiques qu’ils nous rendent. Dans un contexte de croissance démographique et d’amélioration globale du niveau de vie, qui aggravent les pressions sur la biodiversité marine et côtière (besoins alimentaires supplémentaires, accroissement du trafic maritime, poursuite de l’étalement urbain au niveau des côtes), favoriser des pratiques de gestion plus durables des écosystèmes marins est donc essentiel.
Quels cadres existent pour aider les entreprises à mesurer et réduire leur impact sur la biodiversité marine ?
En ligne avec une prise de conscience de plus en plus marquée de l’enjeu de préserver la biodiversité marine, les entreprises sont poussées à mieux mesurer, suivre et rendre compte de leurs impacts. Le cadre international, les réglementations et les standards volontaires structurent les exigences et bonnes pratiques de mesure d’impact. Ces cadres complémentaires se construisent simultanément et de manière itérative ; ils sont essentiels à la définition de stratégies biodiversité robustes.
Cadre international et réglementations
Le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal (Global Biodiversity Framework – GBF) a ancré fin 2022 l’engagement international pour la préservation de la biodiversité marine, avec deux cibles pour lutter contre la dégradation des écosystèmes associés : veiller à ce qu’au moins 30 % des zones d'écosystèmes marins et côtiers dégradés fassent l'objet de mesures de remise en état efficaces d'ici à 2030 (cible 2), faire en sorte qu’au moins 30 % des zones marines et côtières soient dûment conservées et gérées grâce à la mise en place d'aires protégées d'ici à 2030 (cible 3).
Le rapport Nexus de l’IPBES concrétise ce cadre en proposant 71 réponses possibles pour préserver le nexus[16] biodiversité, eau, changement climatique, alimentation, santé. Ces réponses sont réparties en 10 catégories, chaque catégorie était associée à une ou plusieurs cibles du GBF.
En parallèle, les exigences de l’Union Européenne en matière de développement durable des entreprises règlementations, comme la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), intègre spécifiquement des obligations de reporting sur la gestion des ressources marines à travers l’ESRS E3 - eau et ressources marines[17]. Les exigences de l’ESRS E3 mettent en avant les interactions entre les activités humaines et la biodiversité marine.
Que doivent publier les entreprises soumises à l’ESRS E3 ?
L’ESRS E3 fait partie des normes thématiques de la CSRD dont l’obligation de reporting dépend des résultats de l’analyse de double matérialité. Si la thématique « ressources marines » est identifiée comme matérielle pour l’entreprise, c’est-à-dire qu’elle présente un fort enjeu en matière de matérialité d’impact (effets des activités de l’entreprise les écosystèmes marins) et/ou de matérialité financière (effets des écosystèmes marins et de leur évolution sur la performance économique de l’entreprise), l’entreprise doit publier les informations suivantes :
Processus d’identification des impacts, risques et opportunités (IROs) liées aux ressources marines (méthodologie, résultats),
Politiques en place pour gérer ces IROs, notamment en matière de gestion des eaux (utilisation des ressources marines, pollution des océans, traitement des eaux), d’intégration de l’enjeu de préservation des ressources marines dans la conception des produits et services de l’entreprise,
Moyens alloués pour éviter et/ou réduire l’utilisation de ressources marines,
Objectifs fixés en matière de gestion durable des ressources marines,
Indicateurs de suivi (ex : quantités de ressources marines utilisées, par type),
Quantification des effets financiers des IROs pour l’entreprise.
Initiatives volontaires et internationales
Des standards volontaires se développent également pour guider les entreprises vers une meilleure gestion de leurs impacts sur la biodiversité marine.
La Task Force on nature-related disclosures (TNFD) et Science-Based Target Network for Nature (SBTN) ont développé des guides pour accompagner les entreprises dans la définition de leur stratégie biodiversité, du diagnostic au reporting. Plus spécifiquement, SBTN propose un guide pour définir les objectifs de l’entreprise en matière de biodiversité marine.
Aussi, les standards du Partnership for Biodiversity Accounting Financials (PBAF) permettent aux institutions financières d'évaluer les impacts et dépendances des prêts et investissements sur la biodiversité pour gérer efficacement leurs risques et opportunités, en rendre compte et favoriser des investissements bénéfiques pour la biodiversité.
Les acteurs internationaux s’organisent pour travailler collectivement à une meilleure prise en compte des enjeux de biodiversité marine et de nombreuses initiatives se sont lancées. Depuis 2015, Carbone 4 a recensé plus de 54 initiatives nationales et internationales, portées par une diversité d’acteurs : ONG (24), organes intergouvernementaux ou gouvernements (17), institutions de recherche (10) ou encore secteur privé (7). Cela illustre la montée en puissance de ce sujet. À titre d’exemples :
Dès 2008, un partenariat d’institutions internationales a émergé autour de la Global Ocean Biodiversity Initiative et réfléchit à la mise en œuvre concrète des principes de la Convention sur la Diversité Biologique (CDB),
En 2021, Les Nations Unies ont lancé la Décennie pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030). Cette initiative a vocation à accélérer les avancées scientifiques afin de mieux comprendre et protéger les océans[18],
En 2021, l’Ifremer et le CNRS ont lancé en France un Programme Prioritaire de Recherche « Océan et climat » pour améliorer la connaissance du milieu marin,
En 2021, la Fondation de la Mer, en collaboration avec le Ministère de la Mer et le BCG, a lancé le Référentiel Océan et le label Ocean Approved, outils basés sur les Objectifs de Développement Durable de l’ONU pour analyser, réduire et suivre les impacts des entreprises sur l’océan[19],
Fin 2024, la Convention des entreprises pour le climat a lancé un parcours Océan dédié à la réflexion autour de stratégies pérennes pour accompagner la transition énergétique des entreprises du secteur du maritime.
Comment les entreprises mesurent leurs impacts sur la biodiversité marine ?
Quels outils existent pour aider les acteurs économiques à mesurer leurs impacts sur le milieu marin ?
Si la mobilisation des acteurs internationaux pour mieux protéger les milieux marins est croissante, quels outils leurs permettent de mesurer leurs impacts ? Pour bien comprendre le niveau de maturité de la mesure des impacts des activités économiques sur la biodiversité, Carbone 4 a réalisé une analyse des outils existants, dont nous proposons ici une synthèse.
Sur 141 outils, métriques, indicateurs et strates de données recensés par Carbone 4, 89 sont des indicateurs d’état de la nature sans lien avec les pressions humaines, 36 mesurent les pressions sans relier leurs effets à l’état des écosystèmes et 9 outils, en cours de développement, intègrent la relation pression-état pour le milieu marin.
Les limites des outils existants
Les outils de mesure des impacts des activités économiques sur la biodiversité peinent à se structurer, sur la biodiversité marine en particulier. Cela s’explique notamment par la difficulté d’avoir, à l’échelle d’une organisation, une vision globale et consolidée d’enjeux de biodiversité observés localement, par le manque de connaissance scientifique sur la biodiversité marine et par le caractère dynamique de la biodiversité marine. Contrairement au carbone, qui dispose d'une métrique globale comparable, connue et largement utilisée (la tonne de CO2 équivalent), un panel de métriques est nécessaire pour rendre compte des dimensions multiples de la biodiversité, (1) pour les écosystèmes : la condition, structure et fonction des écosystèmes, (2) pour les espèces : le risque d’extinction des espèces et enfin (3) la diversité génétique. La notion d’équivalence, cohérente dans l’approche climatique, est questionnée du point de vue de la biodiversité dans la mesure où elle recouvre plusieurs dimensions et aspects, chaque écosystème ayant des propriétés uniques. Les métriques telles que la MSA (Mean Species Abundance) [20] issue du modèle GLOBIO ou le PDF (Potential Disappeared Fraction of species) [21] issu des modèles d’analyse de cycle de vie sont toutefois utilisées pour mesurer la condition des écosystèmes dans différentes méthodes d’évaluation des impacts des entreprises sur la biodiversité.
A ce jour, les outils existants traitent mieux les impacts sur les écosystèmes terrestres et aquatiques que les impacts sur les écosystèmes marins. SBTN souligne notamment le caractère variable de la disponibilité et de la qualité des données relatives aux systèmes marins, fonction de la localisation des stocks halieutiques, de la taille des pêcheries (industrielle ou petite échelle) et de la réglementation locale en vigueur. A titre d’exemple, le Global Biodiversity Score (GBS), outil de mesure d’empreinte biodiversité développé par CDC Biodiversité et utilisé par de nombreuses organisations, permet d’estimer les impacts d’une activité économique donnée sur la biodiversité aquatique et terrestre, mais n’intègre pas encore d’indicateur unique sur la biodiversité marine – certaines pressions sur les écosystèmes marins et côtiers, comme la surpêche, commencent néanmoins déjà à être prises en compte dans l’outil. Les cadres et outils proposent des indicateurs de suivi des pressions sur la biodiversité marine mais ne permettent pas aux entreprises de fixer et suivre une trajectoire chiffrée de ces impacts. Une telle trajectoire serait utile pour permettre aux entreprises de suivre et piloter leurs impacts dans le temps, à l’instar d’une trajectoire climatique.
Noms | Type | Périmètre | Organisation | Description | Avantages | Inconvénients |
---|---|---|---|---|---|---|
ENCORE | Base de données | Approche par pressions et dépendances potentielles
| UNEP-WCMC, Global Canopy, UNEP-FI | Base de données permettant de réaliser un diagnostic qualitatif des impacts et dépendances sectoriels associés à un processus productif donné sur la biodiversité.
| Facile d’utilisation et en accès libre, couvre certaines pressions sur la biodiversité marine.
| Pas de lien entre les pressions et les impacts sur l’état de la nature (analyse qualitative uniquement). |
IBAT | Outil cartographique | Risque sur l’état de la nature (dont le risque d’extinction des espèces) | Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), UNEP-WCMC, Birdlife, Conservation International | Outil cartographique permettant d’identifier les interfaces de sites d’une organisation avec la biodiversité à partir de coordonnées GPS.
| Couvre de nombreuses zones d’importance pour la biodiversité marine (ex : Key Biodiversity Areas, aires protégées, Natura 2000) et les espèces du milieu marin menacées.
| Obtention d’une licence nécessaire à l’utilisation de l’outil, ne permet pas de quantifier les impacts de l’organisation Couverture partielle pour les espèces en milieu marin. |
Marine Species Threat Abatement and Restoration (marine STAR) | Métrique | Pression-Impact (sur le risque d’extinction des espèces) | IUCN | Mesure permettant de déterminer si les actions des organisations peuvent contribuer à enrayer la perte de biodiversité et à réduire le risque d'extinction des espèces dans les océans et les mers. | Spécifique au contexte, données localisée, outil de diagnostic. | Ne couvre pas les écosystèmes, ne couvre pas l’ensemble des groupes taxonomiques,pas encore adaptable dans le cadre d’un plan d’action (développement en cours). |
WWF Biodiversity Risk Filter | Base de données | Risque sur l’état de la nature (dont le risque d’extinction des espèces) | WWF | Outil d’analyse des risques sur la base de coordonnées GPS de l’organisation, en considérant l’état de la nature et des services écosystémiques à proximité des sites.
| Outil ergonomique, intègre la dégradation des écosystèmes marins et la disponibilité des ressources marines.
| Analyse et résultats à une échelle macro : l’extraction des résultats permet d’avoir une vision globale des risques mais non granulaire (ex : le nom des zones clés pour la biodiversité en situées à proximité des sites n’est pas fourni), ne permet pas de quantifier les impacts de l’organisation. |
Ocean+ | Bases de données | Etat de la nature (étendue et condition de certains écosystèmes marins et côtiers) | UNEP-WCMC | Outils cartographiques permettant de visualiser des données sur l’état des écosystèmes marins et côtiers et de la biodiversité marine.
| Couvre plusieurs écosystèmes marins et côtiers clés (ex : mangroves, récifs coraliens, herbiers marins) et zones d’importance pour la biodiversité. | Ne permet pas de quantifier les impacts de l’organisation. |
UNBiodiversity Lab | Base de données | Etat de la nature (étendue et condition de certains écosystèmes) ou pressions | UNEP | Outil cartographique permettant de visualiser des données sur l’état des écosystèmes marins et côtiers.
| Outil ergonomique, comporte des données sur l’évolution des impacts cumulés des activités humaines sur les écosystèmes marins, l’état et la condition de certains écosystèmes. | Ne permet pas de quantifier les impacts de l’organisation, Pas de lien entre les pressions et les impacts sur l’état de la nature. |
Hub Ocean | Base de données | Etat de la Nature (étendue et condition des écosystèmes) ou pressions | Hub Ocean | Regroupement de bases de données et outils cartographiques océaniques.
| Permet un suivi de la santé des océans, des barrières de corail, des émissions des navires.
| Ne permet pas de quantifier les impacts de l’organisation. Pas de lien entre les pressions et les impacts sur l’état de la nature. |
Waterbase | Base de données | Etat de la Nature (etendue et condition des écosystèmes) ou pressions | European Envrionment Agency (EEA) | Base de données européenne sur les milieux aquatiques et marins, intégrant certains aspects liés aux littoraux, aux mers et aux océans.
| Intègre l’impact du changement climatique.
| Se concentre principalement sur les impacts liés au changement climatique (sans les associer à des impacts sur la biodiversité marine), ne permet pas de quantifier les impacts sur les zones concernées. |
EMODnet | Base de données | Etat de la nature ou pression | Commission Européenne | Données géographiques harmonisées sur les habitats marins, la répartition des espèces et les pressions anthropiques | Cartographie des habitats, espèces. | Limité à la Méditerranée Ne fait pas le lien entre pressions et impacts. |
Impact World + | Modèle | Pression-impact (avec une couverture partielle) | Centre international de référence sur l'analyse du cycle de vie et la transition durable (CIRAIG) | Modèle d’estimation des impacts d’activités sur la biodiversité basée sur la méthodologie analyse du cycle de vie, exprimés en PDF.
| Utilise un indicateur agrégé, couvre l’acidification marine, l’eutrophisation marine, l’écotoxicité marine, l’impact de pêcheries.
| Il ne prend notamment pas en compte toutes les pressions sur la biodiversité marine (destruction des habitats, réchauffement des océans...). |
ReCipe | Modèle | Pression-impact (avec une couverture partielle) | National Institute for Public Health and the Environment – The Netherlands | Modèle d’estimation des impacts d’activités sur la biodiversité basé sur la méthodologie d’analyse du cycle de vie, exprimés en PDF.
| Utilise un indicateur agrégé, couvre l’écotoxicité marine et l’eutrophisation marine.
| Ne couvre pas certaines pressions sur la biodiversité marine (exploitation directe des espèces, impact du changement climatique sur la biodiversité marine), approche qui simplifie la relation entre pressions et impacts en utilisant des données moyennes (source d’incertitudes, développement du modèle à l’arrêt (dernière version datant de 2017). |
Biodiversity Footprint for Financial Institutions (BEFI) | Modèle | Pression-impact (couverture partielle) | Pré, CREM, RVO | Méthode d’estimation des impacts des organisations financières sur la biodiversité, basé sur le modèle ReCipe.
| idem ReCipe.
| idem ReCipe. |
LC-Impact | Modèle | Pression-impact (couverture partielle) | Projet Européen regroupant plusieurs universités et entreprises | Modèle d’évaluation spatialisée des impacts d’un produit ou service tout au long de son cycle de vie pour 3 domaines (santé humaine, qualité des écosystèmes, ressources).
| Utilise des facteurs de caractérisation spatialisés et agrégés aux niveaux national / international, couvre l’écotoxicité marine et l’eutrophisation marine.
| Ne couvre pas l’exploitation directe des espèces, les conséquences directes des activités en mer, certaines pressions sur la biodiversité marine (acidification, réchauffement climatique). |
GLOBIO | Modèle | Pression-impact (couverture partielle) | PBL Netherlands Environmental Assessment Agency | Modèle d’évaluation des impacts d’une organisation sur la biodiversité, exprimés en MSA.
| Modèle largement utilisé et reconnu, utilisation d’un indicateur agrégé.
| Ne comporte pas encore de module sur la biodiversité marine. |
Global Biodiversity Score (GBS) | Modèle | Pression-impact (couverture terrestre) | CDC Biodiversité | Modèle d’évaluation des dépendances et impacts d’une organisation sur la biodiversité le long de sa chaîne de valeur.
| Permet de mesurer l’impact des activités sur la biodiversité via un indicateur agrégé (MSA).
| Ne comporte pas encore de module sur la biodiversité marine (développements en cours). |
Biodiversity Impact Analytics (BIA-GBS) | Base de données | Pression-impact (couverture terrestre) | Carbon4 Finance, CDC Biodiversité | Base de données permettant d’évaluer les dépendances et impacts d'une organisation sur la biodiversité
| Idem GBS.
| Idem GBS. |
Corporate biodiversity footprint | Base de données | Pression-impact (couverture terrestre) | Iceberg Datalab, I Care by BearingPoint | Modèle d’évaluation des dépendances et impacts d’une organisation sur la biodiversité, exprimés en MSA.
| Utilisation d’un indicateur agrégé.
| Ne comporte pas encore de module sur la biodiversité marine. |
GID Biodiversity Impact data & Biodiversity Navigator | Modèle | Pression-impact (couverture Terrestre) | Impact Institute | Modèle d’évaluation des impacts et dépendances d’une organisation, de son portefeuille d’investissement et de sa chaîne de valeur sur la biodiversité. | Couvre le changement climatique.
| N’intègrent pas encore de pression sur la biodiversité marine, outil payant. |
Conclusion
Dans un contexte de prise de conscience croissante des impacts et dépendances des activités humaines sur la biodiversité marine, les cadres contraignants et volontaires se structurent pour encourager les organisations à mieux mesurer, suivre et piloter leurs impacts.
En parallèle, des outils se développent pour accompagner les organisations dans l’analyse de leurs impacts sur la biodiversité. Les entreprises disposent de bases de données internationales pour connaître la nature et l’état de la biodiversité marine dans des zones spécifiques et étudier les interfaces de leurs activités avec ces zones. Cela permet déjà de prioriser des actions de réduction des impacts sur les sites situés à proximité de zones d’importance pour la biodiversité marine (ex : aires protégées, sites Natura 2000, etc.). La base de données ENCORE permet aussi d’analyser qualitativement les impacts et dépendances sectoriels associés à un processus productif donné sur la biodiversité marine. Pour compléter ces bases, des modèles d’estimation des impacts des activités économiques sur la biodiversité se développent. Si ces modèles permettent de calculer des indicateurs d’impact de l’entreprise sur la biodiversité terrestre et aquatique à partir de données de pression (monétaires ou physiques), ils ne couvrent pas ou peu les impacts sur la biodiversité marine.
En résumé, les outils existants couvrent de manière insuffisante les impacts des activités économiques sur la biodiversité marine. Il y a un besoin fort de développement méthodologique pour permettre aux entreprises de mieux mesurer leurs impacts sur la biodiversité marine et d’identifier des leviers de réduction de ces impacts.
La France célèbre en 2025 l’année de la Mer et accueille la 3ème Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC3). Nous pouvons espérer que les initiatives en cours poussent les entreprises à s’emparer du sujet pour mieux réduire leurs impacts.
A ce titre, Carbone 4, l’Ifremer et CDC Biodiversité lancent une initiative pour aider les entreprises à évaluer leurs pressions sur la biodiversité et à construire un plan d’action de réduction. N’hésitez pas à nous contacter si vous êtes intéressés par les sujets ou que vous avez des questions.
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